Faux formulaire A dans le US Program
Faux formulaire A dans le US Program
Faux formulaire A dans le US Program
6B_891/2018
Le recourant est l’administrateur-président d’une société active dans le conseil en matière commerciale qui est soumise à la surveillance directe de la FINMA en sa qualité d’intermédiaire financier.
Le recourant avait pour clients un couple d’époux domicilié aux Etats-Unis, dont le mari était citoyen américain et l'épouse avait la double nationalité américaine et argentine. Ce couple était titulaire et ayant droit économique d’un compte joint dans les livres d’une banque en Suisse. Ils étaient également des clients d'UBS.
En 2010, l’AFC a informé les clients du recourant que les données bancaires les concernant dans les livres d'UBS allaient être transmises aux autorités fiscales américaines en vertu de l’« Accord entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d'Amérique concernant la demande de renseignements de l'Internal Revenue Service des Etats-Unis d'Amérique relative à la société de droit suisse UBS SA » conclu le 19 août 2009 (RS 0.672.933.612). Les clients ont recouru contre la décision de l’AFC et à la suite du rejet de leur recours par le Tribunal administratif fédéral, ils ont régularisé leur situation fiscale aux Etats-Unis.
Peu avant le dépôt du recours de ses clients devant le Tribunal administratif fédéral, le recourant a ouvert un compte bancaire au nom d’une société constituée aux Iles vierges britanniques dans les livres de la banque dans laquelle les clients disposaient du compte joint susmentionné, compte qui avait eu des rapports avec le compte UBS des intéressés. Le recourant était administrateur de la société détenant le compte bancaire. Au moment de l’ouverture du compte bancaire, le recourant a indiqué dans le formulaire A que l’ayant droit économique était l'épouse et que cette dernière était domiciliée en Argentine (était jointe au formulaire A une copie du passeport argentin de l’ayant droit économique). Par la suite, les avoirs déposés sur le compte joint appartenant aux clients ont été transférés sur le compte au nom de la personne morale.
A la suite de l’ouverture d’une procédure pénale à son encontre par le Ministère public genevois pour avoir rempli de manière inexacte le formulaire A susmentionné, le recourant a été condamné pour faux dans les titres par le Tribunal de police, jugement qui a été par la suite confirmé par la Cour de justice ( 50 jours-amende, à 290 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans).
Dans son recours au Tribunal fédéral, le recourant s’est plaint du fait que le Ministère public aurait à tort disjoint la procédure le concernant de celle qui avait été ouverte et dirigée à l’encontre des employés de la banque pour l’utilisation du formulaire A indiquant à tort un seul ayant droit économique. Le Tribunal fédéral rappelle que la disjonction de la procédure pénale doit rester l’exception mais rejette le grief du recourant dans la mesure où les faits reprochés au recourant étaient en état d’être jugés, ce qui n’était pas le cas de la procédure dirigée à l’encontre des employés de la banque.
Ensuite, le recourant s’est plaint de la violation de son droit d’être entendu car ses réquisitions de preuves ont été rejetées par la Cour de justice, cette dernière aurait en effet refusé de :
- verser au dossier l’intégralité des courriels échangés par les employés de la banque en charge de la relation bancaire au nom de la personne morale susmentionnée ;
- entendre certains employés de la banque, ses clients ainsi que leur conseiller fiscal.
Le Tribunal fédéral a rejeté le grief du recourant car :
- le Ministère public a versé à la procédure, ensuite la demande de la Cour de justice, les courriels reçus de la banque après avoir effectué un tri à partir des très nombreuses communications;
- certains employés de la banque avaient déjà été entendus par le Ministère public et l’audition des autres personnes demandée par le recourant a été refusée à juste titre par appréciation anticipée des preuves.
Dans un grief ultérieur, le recourant s’est plaint de l’établissement arbitraire des faits ainsi que de la violation du principe « in dubio pro reo », il indique que la banque aurait voulu maintenir sa clientèle américaine et qu’en aucun cas il ne voulait induire cette dernière en erreur en cachant l’identité de l’un des ayants droit économiques.
Le Tribunal fédéral rejette ce grief affirmant qu’il ressortait du dossier que la banque avait la volonté de se séparer des clients ayant un lien avec les Etats-Unis et que le recourant avait essayé de contourner cette politique.
Dans son recours au Tribunal fédéral, le recourant s’est plaint également du fait que le formulaire A ne contenait aucune information mensongère, dans la mesure où l’un des cotitulaires du compte joint avait effectué une donation en faveur de l’autre, avant l’ouverture du compte au nom de la personne morale. Le Tribunal fédéral a rejeté ce grief affirmant qu’il n’y avait pas d’éléments corroborant la théorie de la donation de l’un des époux en faveur de l’autre, de telle sorte que ces derniers étaient les ayants droit économiques de la relation bancaire nouvellement ouverte. Le Tribunal fédéral rejette également le dernier grief du recourant qui contestait la réalisation des éléments subjectifs de l’infraction. On peut se demander à sa lecture comment la banque gérait le processus d'ouverture et de clôture des comptes. On notera enfin que la banque avait participé au programme US et que les clients concernés avaient régularisé leur situation aux USA. Tous ces efforts délictueux pour rien !