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Rapport annuel de l'Ombudsman : quelques réflexions sur les cas relatifs à la gestion de fortune qu'il évoque

Rapport annuel de l'Ombudsman : quelques réflexions sur les cas relatifs à la gestion de fortune qu'il évoque

Résumé : le rapport annuel de l'Ombudsman offre comme toujours un panorama intéressant sur les difficultés rencontrées par les clients des banques suisses. Il faut souligner le sérieux du travail effectué par l'Ombudsman et ses collègues.

On rappellera que l'Ombudsman est une instance de médiation (et non un arbitre) et qu'il ne peut pas instruire les faits litigieux. 

L'Ombudsman est concerné par l'entrée en vigueur de la LSFin et le mécanisme de médiation ainsi institué : « l’Association suisse des banquiers a décidé que l’Ombudsman serait l’organe de médiation pour tous les instituts membres soumis à une obligation d’affiliation légale, soit également pour les instituts membres disposant d’une autorisation autre qu’une licence bancaire. » (p. 10).

On notera la position de l'Ombudsman sur la question, controversée, du rapport entre les règles de la LSFin et les règles de droit privé :

« Les nouvelles obligations de comportement imposées par la loi sur les services financiers étant de nature prudentielle, leur violation peut avant tout entraîner une sanction de l’autorité de surveillance, mais n’engage pas directement la responsabilité civile du prestataire de services financiers en cas de dommage subi par le client. En d’autres termes, le client ne peut faire valoir aucune prétention directe en dommages-intérêts pour violation alléguée de ces obligations. Toutefois, de l’avis le plus répandu, les obligations de comportement relevant du droit de la surveillance doivent avoir un certain effet de rayonnement sur les rapports de droit civil » (p. 12).

Les cas évoqués dans le rapport sont intéressants parfois à cause des faits ayant suscité le litige. Ainsi, le cas du débiteur d'un emprunt hypothécaire qui souhaite mettre fin aux rapports avec la banque créancière parce qu'elle aurait violé le secret bancaire :

« Les clients étaient un couple, dont le mari s’était associé à un partenaire, avec lequel il détenait une société qui entretenait une relation d’affaires avec la banque. Le conseiller clientèle de la banque avait discuté d’un problème lié à un important paiement avec le partenaire commercial du mari alors qu’il avait déjà quitté la société, et ce paiement avait conduit la banque à résilier sa relation d’affaires avec la société. À titre privé, les clients avaient conclu une hypothèque à taux fixe avec la banque. Or, le mari estimait que la banque avait violé le secret bancaire dans le cadre de sa relation d’affaires avec la société, ce qui avait détruit sa confiance à tel point qu’il souhaitait résilier avec effet immédiat la relation bancaire privée que lui et son épouse entretenaient avec la banque et rembourser par anticipation l’hypothèque à taux » (p. 22).

Il ne serait pas utile de résumer un rapport annuel qui se lit d'ailleurs facilement. Nous évoquerons uniquement les cas traités relatifs à la gestion de fortune compte tenu des principes qu'ils permettent de rappeler.

Dans les rapports execution only, le banquier doit transmettre au clients les informations essentielles relatives aux valeurs mobilières qu'il conserve. Ces communications peuvent être multiples. Elles peuvent être d'une nature très différente (participation à des class actions, convocations à des assemblées, etc.…). En l'espèce il s'agissait d'une offre d'échange portant sur une obligation qui nécessitait l'enregistrement préalable du client (p. 31). Une banque doit être organisée pour les envoyer aux clients.

Selon l'Ombudsman « selon l’usage, une banque dépositaire est clairement tenue de transmettre à ses clients déposants toute information importante relative aux événements sur titres (corporate actions) qu’elle reçoit ».

La lecture d'un cas relatif à la mauvaise performance d'un fonds de placement permet d'illustrer que le bon banquier et le banquier diligent ne se confondent pas. Le fonds avait perdu régulièrement de la valeur, mais le client avait été averti des risques qui pouvaient se réaliser de sorte qu'il ne pouvait formuler des griefs du fait de l'acquisition du fonds. Quant à sa conservation sans attirer expressément l'attention du client sur la diminution de valeur régulière, l'Ombudmsan « regrettait certes que la banque n’ait apparemment jamais contacté le client au sujet du fonds de placement conseillé ni attiré son attention sur la diminution des chances de rendement, démarche qui aurait été souhaitable pour assurer un bon service à la clientèle. » (p. 23). 

Dans l'exercice de mandat de gestion de fortune la situation peut être différente et la banque est tenu à notre avis d'avertir le client si les pertes excèdent un certain seuil. C'est d'ailleurs ce qui est prévu dans la système de MiFID II (art. 62 Règlement délégué 2017/565)

Le cas évoqué en p. 25 (mandat de gestion) permet de constater les abus auxquels se livrent certains gérants. Une cliente dont le portefeuille était inférieur à 200.000.- CHF avait un horizon de placement de 4 à 7 ans. La stratégie de placement de la banque prévoyait « environ 45 % de fonds obligataires, 25 % de fonds en actions, 15 % de produits alternatifs et 15 % de liquidités, avec une variation d’environ 5 % ». Une composition trop compliquée pour un portefeuille de cette taille. La banque de surcroît se livrait même à des transactions de swaps pour couvrir le risque de change. Le mandat avait été résilié peu après son octroi compte tenu d'une baisse des marché (attention au facteur temps !). Par ailleurs, les frais de la banque s'élevaient à 1,5 % de la valeur du portefeuille ce qui était évidemment très important. En réalité, ce cas permet de comprendre pourquoi la gestion pour des portefeuilles de moins de 500.000.- CHF doit être très simple et peu coûteuse, ce qui conduit inéluctablement à privilégier une gestion passive. 

Le cas mentionné en p. 27 concernait un produit structuré ; en achetant ce produit, "la cliente s’était engagée, durant une certaine période, à vendre régulièrement des montants en GBP et à acquérir en contrepartie sa monnaie nationale à un prix déterminé." Le cas illustre la nécessité d'une documentation adéquate et, surtout, compréhensible des risques. Celle de la banque semblait défaillante dans la mesure où elle était trop complexe et peu compréhensible. Le cas illustre également la nécessité d'une formation adéquate du personnel, le conseiller à la clientèle s'étant montré dans les entretiens avec le client assez (en réalité trop) optimiste sur l'évolution du produit privant ainsi la description, déjà défaillante, des risques possibles de son effet bénéfique.

Il est intéressant de relever (p. 28) que la fiscalisation des avoirs des clients a une influence sur la gestion. Ainsi, certains produits peuvent avoir une charge fiscale bien réelle alors même que la plus-value qu'ils génèrent n'est pas réalisée :

« Il y a quelques années, la cliente, représentée par son fils, avait régularisé fiscalement la fortune qu’elle détenait auprès de la banque dans son pays de domicile. Une fois ses obligations fiscales remplies, sa fortune auprès de la banque s’élevait à un montant inférieur à un million de francs. Par la suite, la banque a vendu toutes les valeurs patrimoniales de la cliente et les a remplacées par un unique fonds d’allocation d’actifs « maison ». Grâce à cette vente, la cliente a réalisé des bénéfices comptables considérables, qui se sont accumulés au fil des ans. Elle a ainsi dû faire face à des impôts très élevés ». 

L'Ombudsman relevait faisant preuve de sévérité "qu’une banque ayant une clientèle privée internationale se devait de connaître les éléments essentiels des systèmes fiscaux applicables à ses clients. Or, contrairement à la Suisse, de nombreux pays prévoient des impôts sur les bénéfices en capital pour les particuliers. Bien que les spécificités de tels impôts varient en fonction des pays, la banque aurait dû savoir qu’un changement de mandat de gestion de fortune pouvait avoir de lourdes conséquences fiscales pour les clients soumis à des impôts sur les bénéfices en capital, même si elle n’avait effectivement aucune obligation de clarifier la situation fiscale individuelle de la cliente. De l’avis de l’Ombudsman, la banque doit éviter tout acte de gestion dont les conséquences fiscales sont tellement préjudiciables qu’elles mettent en cause le succès du placement"

Le cas évoqué en p. 41 concerne le flash crash sur le marché des devises du 2 janvier 2019. Le client, qui recourait à l'effet de levier, avait subi une perte du fait de la clôture des transactions par la banque suite au mouvement brutal et ponctuel des cours. 

Le client se plaignait du fait que la banque aurait dû suspendre le négoce et que les cours appliqués pour la clôture des transactions étaient artificiels.  La banque contestait cette position ne voulait pas fournir de renseignements sur les transactions effectuées avec sa contrepartie ; elle « estimait ne pas être tenue de divulguer les prix obtenus de son fournisseur de liquidités. Toujours selon elle, une telle obligation ne lui aurait incombé que si elle avait agi en qualité de commissionnaire. »

L'Ombudsman relevait qu'il « convient de prendre en compte le fait qu’une telle situation constitue un conflit d’intérêts pour la banque, et que le client ne peut plus choisir entre les prix de différents fournisseurs en cas de liquidation forcée ». On peut comprendre cette critique mais le client s'était lui-même mis à risque en ouvrant des positions avec un effet de levier sur des marchés où soudain la liquidité pouvait se tarir.

iusNet DB 27.07.2020

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Résumé : le rapport annuel de l'Ombudsman offre comme toujours un panorama intéressant sur les difficultés rencontrées par les clients des banques suisses. Il faut souligner le sérieux du travail effectué par l'Ombudsman et ses collègues.

On rappellera que l'Ombudsman est une instance de médiation (et non un arbitre) et qu'il ne peut pas instruire les faits litigieux. 

L'Ombudsman est concerné par l'entrée en vigueur de la LSFin et le mécanisme de médiation ainsi institué : « l’Association suisse des banquiers a décidé que l’Ombudsman serait l’organe de médiation pour tous les instituts membres soumis à une obligation d’affiliation légale, soit également pour les instituts membres disposant d’une autorisation autre qu’une licence bancaire. » (p. 10).

On notera la position de l'Ombudsman sur la question, controversée, du rapport entre les règles de la LSFin et les règles de droit privé :

iusNet DB 27.07.2020

 

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